Noyau de cerise

2013-2014, Normandie / France

(extrait)

Brix, château de Pannelier, piste et atelier d’assemblage, juin 2013.
« Ce choix du lancement des armes secrètes à partir de d’énormes constructions en béton n’était pas partagé par les généraux Dornberger et Heinemann, futur commandant des corps d’armée spécialisés dans le lancement des armes V. »
- DESQUESNES Rémy, Les armes secrètes d’Hitler, Rennes, Ouest France éditions, 2012, p. 23.
Brix, transformateur, juin 2013.
« Chacun de ces site devaient comporter, outre l’Abschussrampe, ou rampe de lancement, protégée contre les bombardements par deux haut murs en béton, une dizaine de bunkers (stockage, ateliers, bâtiment de réglage, abris divers) reliés par des routes en béton. »
- DESQUESNES Rémy, Les armes secrètes d’Hitler, Rennes, Ouest France éditions, 2012, p. 32.
Brix-Sottevast, bunker inachevé destiné au lancement des fusées V2, juillet 2013.
« Cette immensité du projet, voilà bien ce qui dépassait le sens commun ; la guerre totale était ici révélée dans sa dimension mythique. »
- VIRILIO Paul, Bunker archéologie, Paris, les éditions du demi-cercle, 1994, p. 12.
La Glacerie, lieu-dit La Flague, bunker abritant les réactifs, juillet 2013.
« Les avions sans pilote continuent leur sarabande. On signale que les Allemands ont continué à envoyer hier, leurs avions sans pilote dans le sud de l’Angleterre. Des dommages et des victimes en ont résulté quoique plusieurs de ces machines furent détruites par les chasseurs anglais avant qu’elles aient pu accomplir leur mission de mort. Depuis le début de cette offensive, que l’on peut qualifier de mécanique aussi bien que de poltronne, les chasseurs anglais et la D.C.A. anglaise ont abattu un grand nombre de ces avions. Les Allemands sont passés maîtres dans l’art de faire travailler hommes et machines à leur profit.. L’avion sans pilote en est un exemple de plus. C’est un avion aussez petit muni d’un moteur spécial et rempli d’explosifs. A l’arrière se trouve un feu rouge qui s’éteint lorsqu’on cale le moteur. Une fois le moteur calé, l’avion descend en tourbillons et quelques secondes après avoir touché terre, fait explosion.»
- Liberator (premier journal publié en Normandie par l’armée américaine), n°5, 21 juin 1944, p. 1.
Brix-Sottevast, bunker inachevé destiné au lancement des fusées V2, juillet 2013.
« Ces trois Sonderbauten (ouvrages spéciaux) étaient situés l’un dans la péninsule du Cotentin et les deux autres dans le nord de la France. Dès le mois d’août 1943 , leur construction avait commencé : dans la péninsule du Cotentin au sud de Cherbourg, à Couville, site désigné dans les KTB sous les initiales B8… »
- DESQUESNES Rémy, Les armes secrètes d’Hitler, Rennes, Ouest France éditions, 2012, p. 25.
Mesnil-au-Val, lieu-dit La vente du parc, rampe de lancement, juin 2013.
« Les renseignements donnés par la Résistance et les reconnaissances aériennes ont permis d’identifier une centaine de bases de lancement pour fusées V1. Des rampes en formes de ski sortent de terre le long de la bande littorale qui s’étend du Nord-Pas-de- Calais au Cotentin et menacent directement le sud-est de l’Angleterre. Les forces de bombardement stratégique et tactique interviennent dans le cadre de l’opération Crossbow. »
- PRIME Christophe, Les bombardements du Jour J et de la bataille de Normandie, dans, - QUELLIEN Jean, Les Normands au cœur de la guerre, dans, GARNIER Bernard, LELEU Jean-Luc, PASSERA Françoise, QUELLIEN Jean, sous la dir. de, Les Populations civiles face au débarquement et à la bataille de Normandie, colloque internationale, Mémorial de Caen, 25-27 mars 2004, Caen, Mémorial de Caen, 2004, p. 34.
Mesnil-au-Val, lieu-dit La vente du parc, atelier, juin 2013.
« Le monolithe ne vise pas à résister aux siècles, l’épaisseur de ses parois signale seulement la puissance probable de l’impact, dans l’instant de l’assaut… Le paysage de la guerre contemporaine est celui d’un ouragan qui projette les choses et les disperse, puis les dissipe et les désintègre par la fusion et la fission. »
- VIRILIO Paul, Bunker archéologie, Paris, les éditions du demi-cercle, 1994, p. 39.
Mesnil-au-Val, lieu-dit La vente du parc, bâtiment amagnétique, juin 2013.
« … après l’enfouissement des usines et des entrepôts, les voies ferrées, les routes et les aéroports représentent les derniers équipements de surface. On remettra en cause cette fixité de l’infrastructure, cet aménagement permanent du paysage, au profit de structures mobiles et démontables. »
- VIRILIO Paul, Bunker archéologie, Paris, les éditions du demi-cercle, 1994, p. 41.
Brix, magasin de stockage d’explosif, rampe de lancement V1, juin 2013.
« Le béton n’est pas toujours la solution la plus adéquate contre les bombardements aériens », écrivait Heinemann. L’utilisation du camouflage naturel et d’équipements simples faciles à dissimuler, la dispersion des installations avec des tirs alternés entre les différentes positions et l’utilisation de galeries souterraines pour le stockage en arrière des bases de lancement semblaient à Heinemann une bien meilleure solution. »
- DESQUESNES Rémy, Les armes secrètes d’Hitler, Rennes, Ouest-France, 2012, p. 47.
Nouainville, lieu-dit Croix rouge, bâtiment destiné à abriter les détonateurs, juillet 2013.
« En décembre 1943, constatant que les rampes de lancement se multipliaient, les Alliés programmèrent leur destruction dans le cadre d’une opération que Churchill, toujours imaginatif, baptisa Crossbow (arbalète). »
- WIEVIORKA Olivier, Histoire du débarquement en Normandie, des origines à la libération de Paris 1941-1944, Paris, Seuil, 2007, p. 156.
Brix-Sottevast, lieu-dit Les Blanches Pierres, bunker, juillet 2013.
« Difficile à dissimuler au repérage aérien, le vaste chantier de Couville (B8), situé au sud de Cherbourg, subissait un bombardement ravageur. »
- DESQUESNES Rémy, Les armes secrètes d’Hitler, Rennes, Ouest France éditions, 2012, p. 32.

Le Cotentin représentait pour l’armée allemande un saillant stratégiquement très intéressant. Les côtes Anglaises n’étaient en effet qu’a quelques encablures pour les nouvelles armes du programme « noyau de cerise », les fameux V1 et V2.

Les installations destinées au lancement de ces bombes volantes, s’étendaient sur plusieurs hectares, elles comportaient chacune une dizaine de bâtiments et une rampe de lancement, le tout relié par des pistes bétonnées. Ces infrastructures lourdes ne pouvaient donc très longtemps échappées aux regards alliés. Ces architectures très intensivement bombardées, furent alors abandonnées au profit de rampes mobiles plus aisées à camouflées.

Cette série se penche sur ces architectures aussi fantomatiques qu’inquiétantes. Disséminées dans la campagne Cherbourgeoise elles ont depuis trouvées de nouveaux usages. Parfois utilisées comme granges, hangars ou étables, elles sont aussi fréquemment totalement livrées à elles mêmes, naufragées en plein champs elles s’imposent, mystérieuses formes sculpturales soumises à une dégradation lente. La mémoire de ces fusées maléfiques est ici abandonnée. Ces engins trouveront néanmoins une descendance plus pacifique en s’imposant très paradoxalement comme les véritables prémices à de nouvelles formes de libertés ; l’aviation à réaction moderne, la conquête spatiale et les télécommunications satellitaires.