Les voix de l’hôpital

2016, France

Bâtiment St Roch
"Ce que j’ai aimé au départ c’est les cours, avec ce fer forgé. Ca m’évoque vraiment les villes thermales du début du XXeme siècle. Je trouve que cela a beaucoup de charme. C’est vraiment l’endroit que je préfère. Les cours, j’y tiens oui, oui je trouve ça très beau. Après j’aime bien la rotonde aussi, ça me plaît, même si c’est un peu austère, mais j’aime bien. Je crois que c’est l’essentiel en fait."
Agnés PERRIERE (Psychologue)
Bâtiment St Agathe
"En arrivant je l’ai trouvé beau. L’architecture, les jardins, les fleurs, les différents couloirs… j’ai ressenti qu’il y avait une âme dans ce lieu. Et l’énorme déception quand j’ai appris que tout cela allait être rasé, détruit. Ma première impression c’est celle là, je rentre dans les cours et je découvre une architecture…"
Amar BOUNACHADA (infirmier Rebond)
Vue sur la chapelle depuis les jardins
"Ce bâtiment en arc de cercle à l’entrée principale et la chapelle derrière, Ce sont les premiers bâtiments et ce sont les bâtiments qui représentent un peu l’âme de sainte Marie, son histoire et son âme. Après bien sur Sainte-Marie s’est construit autour de plein d’autres bâtiments qui sont arrivés au fil des années. Mais l’essence même de Sainte Marie c’est la Chapelle ; ce sont ces bâtiments là, par lesquels tout a commencé."
Cecile COSTE-RAMIREZ (Secrétaire Service techniques)
Cour de la buanderie
"C’est immense ! c’est immense et… on a peur de se perdre, entre guillemet. On sait rentrer mais des fois on ne sait pas par où sortir. C’est tellement immense l’hôpital. "
Frédéric VIVA (Aide soigant, service Saint Joseph ex. Saint Aubin)
Ancienne cour des femmes
"Moi j’apprécie beaucoup les jardins. Pour les patients je pense que c’est très important, mais pour nous aussi, personnel dans l’établissement, c’est apaisant, la verdure c’est quelque chose d’apaisant. En plus avec les vieilles pierres cela se marie très bien, très beau." Corine LAGARDE (Pharmacien chef)
Accés au bâtiment St Thérèse depuis l'I.F.P.S
« Ce qui est étonnant dans Sainte-Marie c’est qu’on s’habitue au lieu petit à petit, mais de temps en temps à l’occasion d’une recherche, …on recherche un local, où on recherche un objet particulier. On va nous ouvrir des portes de lieux que l’on ne connaît pas, et là on se retrouve dans le vieux Sainte-Marie, c’est très impressionnant. »
Corine LAGARDE (Pharmacien chef)
Locaux vides dans le bâtiment St Roch
«J’ai visité un vieux service désaffecte et il y avait une pièce en particulier là ou les patients recevaient des soins. Ce lieu est chargé, on imagine ce que pouvait être la psychiatrie il y a assez longtemps. Ce n’est pas la psychiatrie d’aujourd’hui. On a le sentiment que s’y sont passées des choses importantes : ça met en route un imaginaire. »
Corine LAGARDE (Pharmacien chef)
Locaux vides dans l'ancienne communauté, bâtiment Notre Dame
« Il y a ces locaux là en bas et puis la chapelle et l’arrière chapelle, avec tout ce mobilier, on imagine toute la congrégation qui faisait vivre tout cela, c’est magnifique. Tous les meubles et tout le soin qui y a été porté, parce que en fait je parle d’un temps très reculé mais il y a du mobilier qui est intact. Et encore il y beaucoup de choses qui sont parties, mais il y avait une volonté de conserver incroyable. »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Aumonerie bâtiment St Roch
« Et en même temps toutes ces belles choses elles sont cachées. A tel point que, quand je suis arrivé, vous savez il y a les journées du patrimoine, en fait j’ai regardé le programme de Privas parce que je me suis dit peut être qu’il y a l’hôpital. Parce que vraiment ici c’est l’histoire de Privas, c’est toute l’histoire de la ville. et l’hôpital de Privas n’était pas dedans. Je pense que ca c’est à faire les gens ne s’imaginent même pas tout ce qu’il y a derrière. »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Cour devant St Jeanne d'Arc et la terrasse panoramique
« S’il y avait un lieu à préserver ce sont les cours : ce qu’on appelle ici les cours, c’est le parc. Le travail que fait la personne en charge des plantes, tout ça, c’est juste magnifique. Je pense qu’il faut préserver absolument cet endroit là. C’est beau, c’est agréable enfin voilà. Un peu de… comment dire… de douceur dans un monde difficile qu’est la psychiatrie, enfin la folie. »
Amar BOUNACHADA (infirmier Rebond)
Entrée du bâtiment St Roch
«  Privas c’est localement et traditionnellement la ville des fous, où on va t’emmener si quelque chose ne va pas. Cette référence là je l’ai depuis ma plus tendre enfance. Privas ça représentait ça, alors évidemment ça a eu le temps d’évoluer. Un c’est l’Ardèche, deux c’est Privas, trois c’est effectivement un modèle d’hôpital, avec des modèles financiers et managériaux que je n’ai jamais connus ailleurs : très humaniste, pour tout le monde. Que ce soit pour les patients ou autres. Avec une forte notion, au sens noble du terme, de l’asile. Ou chacun, chacune des personne, quelle soit soignante ou soignée, vient y chercher un refuge. Après ce qui m’a surprise c’est que, ici on se dit on est dans un hôpital psychiatrique. D’autres hôpitaux psychiatriques, et c’est mieux, c’est bien, ont une architecture autre, qui se rapproche d’un hôpital plus classique, ou il n’y a pas d’empreinte architecturale ou de signe architectural qui ferait penser que… »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Les cuisines
«  Il y a eu jusqu’à 2000 patients, ça faisait entre 4 et 5000 repas jours. Il y avait 54 personnes au total en cuisine, il y avait 45 permanents, il y avait les patients qui aidaient aussi, pour tout ce qui est légumerie, plonge. On avait une légumerie une boucherie, une boulangerie, une pâtisserie, les boulangers faisaient le pain tous les matins, des croissants et des pâtisseries le WE. »
Michel JEAN (Chef cuisinier)
Les cuisines
« Il y avait 20 tonnes de Pommes de terre qui arrivaient à la gare et qui étaient livrés au CAT. Et du CAT on livrait au fur et à mesure les patates dont on avait besoin pour la journée et après on partait côté pluche. Et les personnels qui étaient à la pluche épluchaient toute la journée les pommes de terre et les carottes. Il y avait aussi des personnes qui faisaient les jardins et qui livraient des produits tout frais.  »
Michel JEAN (Chef cuisinier)
Pôt de fleurs dans le jardin des soeurs
« Il y avait les jardiniers qui étaient salariés de l’hôpital, qui entretenaient complètement les jardins de l’hôpital, qui cultivaient leurs plantes. Il y avait des potées magnifiques. On y allait avec les patients. On allait chercher des fleurs. Ils faisaient beaucoup de fleurs pour garnir les parterres de l’hôpital mais en plus des pots de fleurs pour égayer les services, pour la congrégation, pour fleurir la chapelle. On revenait avec des azalées, des cyclamens, c’était une sortie… C’était beau, c’était joli…  »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Le jardin des soeurs
« Il y avait aussi des patients qui travaillaient à la serre, c’était un endroit de promenades. Il n’y avait pas les parkings intérieurs qu’il y a maintenant, on allait se promener avec les patients, c’était un endroit ombragé, certains services avaient un poulailler, d’autres avaient fait un petit bout de jardin. »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Galerie et statue dans la cour des femmes
« Il y a une empreinte très forte de la congrégation, avec les crucifix, et c’est très étonnant lorsque je suis arrivée ; ici j’ai photographié cette statue de Jésus-christ que j’ai trouvée quand même assez insolite, quand j’ai montré la photo, on m’a demandé ou c’était dans l’établissement, parce que plus personne ne la voit.  »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Reliques du père Choron dans la chapelle
« N’oublions pas qu’ici c’est le berceau, c’est la grande fierté de tout le monde : avec la Sainte Famille qui vous accueille et les reliques du Père Chiron. L’hôpital psychiatrique avant tout quand on me l’a présentée, quand les gens en parlent, c’est ça, c’est des reliques, c’est le père Chiron.  »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Réserve de la buanderie
« Au delà de la fonction d’hôpital, il y a aussi la fonction de l’asile, vous voyez tout ce que l’on a pu prendre en charge. Ça on l’a effectivement réduit, avec plus de 1000 lits, comme on a dans les hospices, ça on ne l’a plus, on est quand même dans une architecture qui n’existe plus, avec ces grands dortoirs : les tendances actuelles, les décrets, nous poussent à reconstruire pour ne plus être dans des locaux pareils. Ces locaux sont inadaptés et ont des répercussions très importantes sur la liberté de circulation.  »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Palier d'accés à la pharmacie
« Je suis pas nostalgique du passé. J’apprécie beaucoup de visiter d’anciens services, parce que cela m’évoque des choses. Je suis quelqu’un qui va de l’avant, je pense qu’il ne faut pas spécialement garder des lieux, peut être quelques objets. Peut être faut il faire un musée dans lequel on garderait des objets qui soient très symboliques de la psychiatrie d’avant. Peut être pour que l’on se rende compte du chemin parcouru car cela s’est beaucoup amélioré. On est beaucoup plus humain dans le soin que l’on apporte aux patients aujourd’hui qu’on ne l’a été dans le passé, Je pense, je n’en suis pas sûre, mais je pense. Est ce que des objets peuvent garder cette mémoire là ? Peut être. Mais des lieux, non, je pense pas, il faut aller de l’avant.  »
Corine LAGARDE (Pharmacien chef)
Garage, ancien abattoir
« L’hôpital vivait en autarcie. Il y avait des abattoirs qui étaient au bout des services techniques. Ils ont été jusqu’à 80 dans les ateliers et les services techniques. Il n’y a pas si longtemps que ça encore. Au bout des services, là ou se trouve le garage maintenant, il y avait les abattoirs. Ils tuaient eux même les cochons, ils les assommaient à la masse.  »
Michel BOISSONNAT (contremaitre aux services techniques)
Services techniques
« On a des archives qui sont très intéressantes, des plans qui sont très vieux et très beaux, qui sont l’histoire de notre patrimoine immobilier. Donc une partie avait déjà été classée dans des boites, par contre il n’y avait pas eu de répertoire de fait. Donc on avait des boîtes mais on ne savait pas ce qu’il y avait dedans. Donc pendant tout un mois je me suis enfermée dans cette pièce archive, pour réaliser ce fameux répertoire et pour classer toutes ces archives. Les anciennes qui étaient déjà en partie classées mais aussi les nouvelles qu’il fallait classer et répertorier. Donc j’ai eu l’occasion de découvrir de très vieux et très beaux plans. Ca a demandé un travail phénoménal. Le but c’était de répertorier les plans par bâtiment. Ca n’a pas été chose facile puisque les bâtiments ont changé plusieurs fois de noms au fil des années, ensuite ils ont pris des numéros avec de nouveaux noms. Donc il a fallu faire le lien entre les anciens noms et les nouveaux noms d’unité de soins… Pour cela j’ai dû souvent faire appel à la mémoire d’anciens salariés qui avaient trente ou quarante ans de service ici.  »
Cecile COSTE-RAMIREZ (Secrétaire Service techniques)
Accés à la salle polyvalente sous-sol du bâtiment St Roch
« On était accueilli à la conciergerie et une personne du service auquel vous étiez affecté venait vous chercher. Donc je me souviens de la dame qui est venue me chercher. Ca je m’en souviendrait toujours. C’était une infirmière qui était diplômée déjà depuis quelques années avec laquelle j’ai travaillé ensuite, qui est aujourd’hui disparue. C’était un peu, ce jour là, ma marraine.  »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Buanderie bâtiment 3
« On m’a emmenée à la buanderie, me munir de blouses. Et évidemment comme je n’étais pas bien grande j’avais des blouses qui étaient trop longues, avec un ourlet à faire de cinquante centimètres peut être. »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Buanderie, armoire de rangement
« On m’a installée avec une boite à couture, et on m’a dit “bien tu feras ton ourlet”. Oh ! la vache ! je savais pas coudre moi ! Ça a été une angoisse, ça y est, ça vas être foutu, je veux dire, on va me juger déjà sur la première impression :”elle arrive et elle sait même pas tenir une aiguille”… »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Soph
Locaux vides dans le bâtiment St Roch
« En fait j’apprécie tout, parce que quelque part, c’est une part d’histoire. Quand j’ai pénétré dans la chapelle, je veux dire, je visite. C’est quelque chose de complètement incongrue. Je suis en visite. Je ne me sens pas… je ne me sens plus mal. Parce quand je suis arrivée, j’ai eu un petit temps de recul. Je ne m’y sens plus mal et j’apprécie. »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Services techniques, armoire des clefs
«  Effectivement il faut arriver à caler son comportement dans les locaux et avec les gens pour s’y sentir bien. C’est à dire : admettre que l’on n’est pas dans des locaux complètement ouverts et que les collègues ne sont pas immédiatement à côté. Comprendre qu’il y a des tours de clefs encore partout et que l’on n’est pas avec des badges beaucoup plus discrets. Comprendre aussi toute la difficulté pour ouvrir une porte. »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Le parc devant le bâtiment St Jeanne d'Arc
« Je peux pas dire que je ne m’y sente pas bien, je n’ai pas de réserve mais effectivement l’endroit où je me sent bien c’est le parc, et beaucoup la chapelle. Pas pour le côté religieux, mais parce que j’ai été complètement émerveillée par cet endroit qu’on n’imagine pas. »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Couloir dans le bâtiment Joseph Chiron
« Parfois je me perds dans la géométrie des couloirs de certaines unités. En tant qu’homme on intervient souvent sur des situations de crises de violence. On est appelé en renfort, pour maitriser une situation compliquée, même clairement l’agressivité d’un patient. On a un système qui s’appelle la protection du travailleur isolé. C’est un boîtier qui est actionné lorsqu’il y a une situation d’agressivité. Ça prévient tout l’hôpital. Là, tout les soignants arrivent sur le lieu de la crise, pour prendre en charge au mieux la personne qui est en crise. Donc parfois c’est vrai que je me perds dans les couloirs, l’architecture fait que… »
Amar BOUNACHADA (infirmier Rebond)
Le chemin de ronde
« A l’époque quand je suis rentrée, en 2005, il y avait quelque chose qui se faisait et qui était très bien c’est qu’on était accompagné par un parrain, qui nous faisait visiter tout l’hôpital. Donc à l’époque la personne que j’ai remplacée ici m’a fait visiter l’hôpital m’a amenée dans des unités de soins, un peu partout. C’est ce qui a un peu contribué à mon étonnement du départ en me disant ouah ! s’il me laisse ici seule je vais me perdre et mettre trois jours à me retrouver. »
Cecile COSTE-RAMIREZ (Secrétaire Service techniques)
Couloir dans le bâtiment St Paul
« Ah oui, je voulais repartir, j’avais extrêmement peur, c’était un service qu’on appelait à l’époque « chronique », de patients qui étaient là depuis des années, et qui étaient équilibrés par des traitements très, très lourd. Et donc je me souviendrais toujours quand je suis entrée dans ce long couloir, très étroit, il y avait une salle commune, et les patientes étaient toutes alignées, parce-qu’il faut savoir qu’il y avait côté femmes et côté hommes. Ces patientes alignées dans ce couloir j’en ai rêvé pendant très longtemps et le soir j'avais appelé mes parents en leur disant, je ne veux pas rester ici, c’est pas possible. Ce qui me dérange le plus, c'est de devoir ouvrir à clef tout le temps comme ça, toutes les portes et en même temps on est en psychiatrie. C'est un lieu très fermé, très lourd. »
Martine FAURE (infirmière spécialisée sport)
Coursive d'accés à la cour St Augustin
«  Donc il y avait quatre kinés, alors nous nous sommes divisés les pavillons puisque pour nous, il n’y avait pas de différence entre homme et femme donc je me suis occupée du coté hommes, ça s’appelait Saint Jean. Donc oui, il y avait un côté hommes et un coté femmes, avec pour frontière l’église qui séparait très religieusement, ces deux côtés. »
Hélène CHARRE (Kinésithérapeute)
Cour St Augustin
« Du côté hommes, la seule présence féminine était celle des sœurs, personne d’autres, il n’y avait que des patients et des soignants masculins. Et moi j’allais là bas et c’était un moment très fort, parce que je devais avoir 22 ans et donc, j’arrive dans cette cours. Heureusement, les sœurs m’avaient fait confectionner une cape en drap couvrante et qui effectivement, étaient faites pour me protéger, m’aider un peu. Donc quand j’arrivais côté homme, j’avais tous ces messieurs qui étaient en train de me toucher, de me regarder, par dessous, de rentrer en contact avec moi, et moi qui essayais toujours, de faire avec et puis de traverser la cours. Et en général, les infirmiers qui, quand ils me voyaient, restaient dans leurs services a me regarder en rigolant, puis après, en accueillant la petite kiné, ça les amusait beaucoup.  »
Hélène CHARRE (Kinésithérapeute)
Accés à la salle de judo depuis la cour St Augustin
« C’est vrai que tout le côté hommes, est un peu plus austère et un peu moins avenant que le côté femmes qui est tout à fait fleurie. C’est un lieu qui ne vit plus. Avant, même si c’était un peu sombre, il y avait des ateliers très intéressants, ferronnerie par exemple. Et ce qui était bien, c’est qu’une fois par an, il y avait une ouverture sur l’extérieur et il y avait une sorte de fête où on exposait ce que faisaient les patients. C’était pas mal, ça enlevait le coté enfermement, parce que les gens pouvaient entrer et se rendre compte que c’est plus jolie que ce qu’on pense. »
Hélène CHARRE (Kinésithérapeute)
Ancienne conciergerie de l'entrée du personnel
« La pointeuse à l’époque c’était quand même quelque chose. C’était tellement lié à notre quotidien. C’était, arriver à l’heure et partir à l’heure. C’est plus le cas aujourd’hui, il y a toujours un système de pointage mais les horaires sont plus flexibles aujourd’hui, il y a un nouveau logiciel. Cette pointeuse elle était à la conciergerie. L’accueil du personnel se faisait route des mines, complètement en bas. »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Comptoir de l'ancienne conciergerie
« Il y avait un local où il y avait une espèce de grande banque, au milieu. Il y avait toujours un ou deux concierges, avec des grandes armoires où il y avait toutes nos clefs. Quand on arrivait il y avait une grand tableau, on avait une carte de pointage cartonnée, avec notre numéro de pointage qu’on nous donnait à l’entrée et qu’on a toujours gardé et donc ce numéro correspondait à notre numéro de clefs et à notre carte de pointage. »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Trousseau de clef de Marie-Laure Sonnier
« Ce numéro je l’ai toujours gardé à ma clef c’est le numéro 399. Je ne l’ai jamais enlevé, je l’ai toujours gardé. Quand on arrivait le matin il y avait un concierge qui nous donnait nos clefs et le soir quand on partait s’il n’y avait personne, parce qu’on sortait dès fois à des horaires décalés, il y avait une sorte de gros panier en osier dans lequel on déposait nos clefs et le concierge les rangeait Les trousseaux de clefs ont beaucoup évolué avant on avait de grosses, grosses clefs, très grandes. Pour nous ça avait une grande importance nos clefs, fallait pas les perdre. Quand on arrivait étudiant ou jeunes, on nous confiait nos clefs, en nous disant attention vous en êtes responsables. Même encore aujourd’hui c’est quelque chose d’incroyable. Si je ne sens pas mes clefs dans ma poche je les cherche. Avant les clefs ne sortaient pas de l’hôpital. »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Atelier d'ergotherapie, bâtiment Notre Dame
« Le matin il y avait des activités d’ergothérapie. C’était un service dame dans lequel j’étais : c’était Saint François, un service qui n’existe plus. Il y avait à peu près 60 personnes dans cette unité. C’était dans des dortoirs, il y avait tout un étage par dortoir, mais il y avait quand même des séparations.  »
Régine MOYON (Cadre supérieure de santé)
Ancienne salle de bain, bâtiment St Roch
« Pour laver le linge, les patientes se mettaient en rang, il y avait deux bassines, une bassine pour laver, donc elles lavaient d’abord leur soutiens gorges, elles le rinçaient, elles allaient l’étendre, elles refaisaient la queue, elles venaient laver leurs bas. C’est quelque chose, j’avais oublié ça. C’est les patientes elles mêmes qui faisaient ça. A l’époque c’était… enfin il y avait beaucoup de gens qui étaient là, mais qui auraient pu être ailleurs. Dans le temps vous rentriez en psychiatrie soit parce que vos familles ne vous voulaient plus, soit il n’y avait rien à la sortie pour vous recevoir. On a beaucoup évolué.  »
Régine MOYON (Cadre supérieure de santé)
Bureaux de la pharmacie
« On a un logiciel de prescription qui s’appelle Cariatides, donc la base de notre activité elle est là dessus. »
Corine LAGARDE (Pharmacien chef)
Rayonnages de la pharmacie
« Cariatides prépare les commandes qui vont dans les services, en fonction des prescriptions et de ce qui reste dans les armoires des pharmacies des services. »
Corine LAGARDE (Pharmacien chef)
Banques d'accueil de la pharmacie
« Cariatides va constituer une commande qu’on va donner à chaque service. Toutes les semaines on donne une grosse commande, tous les jours on donne une petite commande. Mais en général tous les services passent une fois par jour à la pharmacie, c’est eux qui viennent en fait. »
Corine LAGARDE (Pharmacien chef)
Couloir bâtiment Notre Dame
« Il y avait mille patients à l’époque quand je suis arrivée. Tous les services étaient pleins. »
Régine MOYON (Cadre supérieure de santé)
Chambre d'isolement
« Il y a quarante ans, quand je suis arrivée, il n’y avait pas de chambre d’isolement. Le souvenir que j’ai c’est qu’on avait une dame qui était vraiment très agitée, on l’enfermait dans sa chambre mais on avait une surveillance, on restait avec elle. On était beaucoup plus proche des gens. On s’en occupait. J’ai comme souvenir que, quand j’ai été diplômée, donc j’étais dans un service d’entrées. Lorsqu’on posait une perfusion on restait avec la personne le temps de la perfusion. Il y avait le soin médicamenteux mais il y avait aussi la relation avec la personne. On pouvait passer deux heures avec la personne à la surveiller si elle dormait, à discuter si elle avait envie de discuter. On passait du temps avec les gens. C’est quoi notre soin à nous ? La maladie mentale c’est quoi ? C’est la maladie sur le lien. Donc comment on soigne la maladie sur le lien, en essayant d’être dans ce lien et dans ce rapport au lien. Si on ne peut pas être avec les gens c’est terrible. Alors je ne dis pas que les chambres d’isolement ne sont pas nécessaires, mais la chambre d’isolement elle est nécessaire un temps donné ça permet à la personne de dormir. On faisait dormir les gens quand ils rentraient et qu’ils n’étaient pas bien, on les faisait dormir. Il n’y avait pas tous les règlements d’aujourd’hui. Ce n’est pas forcément une critique, c’est un constat. »
Régine MOYON (Cadre supérieure de santé)
Chambre bâtiment Joseph Chiron, service St Joseph
« Je fais des formations, qui sont intéressantes, qui m’apportent quelque chose, je dois encore faire une formation en manutention. Ca permet de manipuler les patients correctement sans leur faire mal, sans nous faire mal à nous même aussi, dans la souplesse, avoir les bons gestes au bon moment, donner les bons ordres, tout ça, c’est tout un cheminement. On ne se rend pas compte quand on fait une manutention qu’on fait mal. Quand on réfléchit comment il faut le faire, il y a une réflexion, il ne s’agit pas seulement de prendre la personne de la lever, de la tourner. On apprend comment lever une personne d’une chaise, comment rehausser une personne dans le lit ; on parle de cuvette, de poussons, de bascule, de cuillère, de riper, on ne parle pas de porter. On n’est pas là pour porter les personnes, si la personne est trop lourde on prend le lève personne. Il faut travailler avec son corps, mais il y a aussi toute une réflexion, y’a pas à forcer, on est pas des bourrins, on est des soignants. »
Frédéric VIVA (Aide soigant, service Saint Joseph ex. Saint Aubin)
Cour St Antoine
« Alors je crois que je m’adapte à tout, mais c’est la population nombreuse, il y avait vraiment beaucoup de patients, ça m’a quand même marqué. Et puis le fait que les infirmiers étaient encore appelés gardiens et ils avaient un rôle quand même bien diffèrent. Plutôt que l’architecture qui ne m’a pas frappée, j’ai trouvé que c’était plutôt bien agencé, même si c’est vrai qu’elle était un peu vieillissante et pas à la pointe du progrès pour les patients. J’ai des images encore où les patients, pour leur éviter de manger leurs excréments, portaient des gants de cuir, ça frappe un peu mais bon, on ne pouvait pas faire autrement. »
Hélène CHARRE (Kinésithérapeute)
Aumônerie
« L’aumônerie fait partie des besoins spirituels de la personne. C’est à dire d’accompagner des personnes dans leurs demandes spirituelles. Ca ne veux pas dire parler de religion ou de Dieu à tout bout de champ c’est plutôt écouter la personne qui se demande pourquoi elle vit, qu’es-ce qu’elle fait là, la maladie, de poser ces questions, mais en dehors des médecins et sans parler forcément de pathologies ou de choses comme ça. »
Sibille BISSON - (aumônière)
Cour St Antoine
« Ce sont des conversations qu’on peut avoir n’importe où. Ces personnes, quand elles sont à l’hôpital, elles n’ont pas accès à l’extérieur facilement donc elles n’ont pas forcement des gens à qui parler ou par qui être écoutées. C'est pour ça qu’il existe des aumôneries. Donc mon rôle est un accompagnement spirituel par l’écoute, par le fait d’être là, d’être disponible. Ca peut être par rendez-vous, par des rencontres dans la cour, de multiples façons et il y a aussi le vendredi matin, ce que j’appelle la halte spirituelle, on discute pendant une heure autour de l’évangile.  »
Sibille BISSON - (aumônière)
Chemin de ronde
«  Le chemin de ronde pour traverser les services, ça fait prison, c’est ce que reprochent les patients. C’est vrai que pour moi au début, c’était difficile, on a tout le temps des clefs, et ce chemin de ronde c’est vraiment marquant de quelque chose d’asilaire. Donc voilà, ce mur là, je ne sais pas si dans tous les hôpitaux psychiatrique il y en a mais ça fait très emprisonnement. »
Dominique GRANGEON (Assistante sociale Addictologie à E.L.S.A )
Sous-sol du bâtiment St Gertrude depuis le chemin de ronde
« Nos locaux sont quand même très vétustes, difficiles à entretenir, et l’entretien est très onéreux, les mises aux normes… donc je suis très consciente que l’on ne peut pas rester dans nos locaux.  »
Cecile COSTE-RAMIREZ (Secrétaire Service techniques)
Sous-sol du bâtiment St Agathe
« Les enjeux, ces dernières années, ça a été l’extension de certains bâtiments, la rénovation de certaines structures. Donc pour nous à chaque fois ça a été de nouveaux challenges, quelque chose que l’on souhaitait mener à bien parce que le confort du personnel et des patients en dépendait. »
Cecile COSTE-RAMIREZ (Secrétaire Service techniques)
Atelier de chaudronnerie
« Aujourd’hui on traite plutôt l’urgence, on n’a plus les moyens de faire du préventif, c’est très compliqué. On le fait mais par les moyens extérieurs.  »
Jean-Marc MAILHE (responsable des services techniques)
Machine reformées dans l'atelier de chaudronnerie
« De plus en plus la compétence fuit l’établissement. C’est pas les mêmes conditions. Il y avait une reconnaissance avant que l’on n’a plus maintenant. »
Jean-Marc MAILHE (responsable des services techniques)
Couloir du bâtiment St Jeanne d'Arc
« Ce bâtiment c’est un anachronisme. C’est un anachronisme parce il a des côtés plutôt chaleureux, plutôt chouettes et bonne qualité, au niveau des qualités de réalisation, des bons matériaux. Mais le problème c’est que c’est beaucoup trop étroit pour faire justement ce qui est indispensable aujourd’hui, c’est à dire des chambres individuelles. Que disent les gens qui rentrent en psychiatrie, le pire c’est la promiscuité. Il y a de la place mais aucun bâtiment n’a la bonne dimension, On a parfois réussi à faire des chambres individuelles dans certains services parce qu’on a réparti le service sur trois niveaux. Les couloirs sont trop étroits et les chambres, elles aussi, sont trop étroites. Quand vous regardez la largeur de ce bâtiment, c’est dérisoire, il y a dix mètres, il en faudrait dix sept. quand vous visitez certaines unités, il y a deux cent mètres d’un bout à l’autre.  »
Franck GIRAUD (Psychiatre, Médecin Chef du service réhabilitation / Vice président commission médicale )
Couloir du bâtiment Joseph Chiron, servide St Joseph
« Et puis il y a l’architecture, la configuration de certaines unités, des couloirs qui tournent, le peu de lumières, le silence. Quand on arrive dans certaines unités, on ressent un certain poids… Il faudrait que ce soit plus lumineux. Dans certaines unités, ou il y a cette ambiance, il n’y a pas d’ouverture. Je pense à certaines unités comme Saint Clément, Saint André, Saint Joseph… Plus de lumière, plus de transparence, plus de clarté… »
Amar BOUNACHADA (infirmier Rebond)
Chambre d'isolement, bâtiment St Paul
« Il y a deux choses que je souhaiterais voir disparaître telles qu’elles existent actuellement. Un, c’est les chambres d’isolement, tel quelles existent actuellement, à cause de l’isolement, non pas parce que ce ne soit pas un acte de soin qui puisse avoir du sens, …parfois, mais on en fait beaucoup trop. Ça ne peut pas disparaître, mais j’aimerais que cela ait moins de place. »
Franck GIRAUD (Psychiatre, Médecin Chef du service réhabilitation / Vice président commission médicale )
Le chemin de ronde, entrée de la cour St Joseph le long du bâtiment St Paul
« Et puis il y a ce que les patients appellent les grilles de Peaugre. Peaugre c’est le parc animalier qui se trouve près d’Annonay. Vous verrez ces grilles dans ce qu’on appelle la petite cour de Saint-Joseph, c’est scandaleux qu’on ne les ait pas fait disparaître depuis des années. La mise en place de ces grilles n’était pas justifiée, ça n’était pas utile, là c’est une violence architecturale folle. Ça ne sert à rien.  »
Franck GIRAUD (Psychiatre, Médecin Chef du service réhabilitation / Vice président commission médicale )
Fenêtre bâtiment St Paul
« Je fais référence par exemple au grillage. Aujourd’hui, il existe des verres sécurisés, qui font que certains hôpitaux n’en ont pas du tout. »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
le chemin de ronde au pied du bâtiment St Agnés
« D’ailleurs il y a un chemin dit de ronde, le personnel le nomme comme ça. Ce vocabulaire, ça fait un peu château fort, ça fait forteresse. »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Porte d'armoire dans le bâtiment St Jeanne d'Arc
« Et il y a encore dessous tous les sous sols, avec aussi, là c’est quand même extraordinaire, on a du mobilier qui ne sert à rien, qui est là depuis des plombes mais qui ne sert à rien. Vous avez aussi du savon de Marseille qui date d’une époque ou c’était encore utilisé. Mais jeter ça c’est impossible, c’est pas concevable. Ici c’est enterrer quelqu’un, où je sais pas.  »
Laurence MOUYON (Directrice des soins)
Salon de discussion service St Jospeh
« Ce lien qui parfois existait avec les gens et qui aujourd’hui n’existe plus que par mail. Nous qui avons connu une autre génération… Moi ça ne me satisfait pas ça, de… dans la vie en général. Facebook et les mails, c’est impersonnel. Il y avait un autre contact avec nos autres collègues soignants ou le reste des gens qui travaillaient à l’hôpital. Il y avait un lien qui était un peu plus resserré, peut être un peu plus affectif. Aujourd’hui c’est plus… voilà… par mail... On ne se connait plus. Je ne dis pas qu’avant on se connaissait tous, sûrement pas parce qu’on était encore plus nombreux. Mais il me semble qu’Il y avait quelque chose… Aujourd’hui on ne se connait plus et on se côtoie peu.  »
Marie-Laure SONNIER (Infirmière Villa St Sophie)
Vue sur les bâtiments St Agathe et St Gertrude depuis la route des Mines
« L’avantage ici c’est que quand les patients sortent il peuvent aller en ville. Il y a beaucoup d’hôpitaux qui sont loin de la ville, ça désocialise encore plus. Mais c’est vrai que vu comment c’est fait ici c’est hyper compliqué de reconstruire ici. Et puis c’est vrai que maintenant on n’a que 240 patients, on n’a pas besoin de tous ces bâtiments qui deviennent dangereux. »
Régine MOYON (Cadre supérieure de santé)

Les voix de l’hôpital ce sont toutes les personnes qui, au quotidien, font vivre ce lieu. Employés depuis quelques mois ou depuis de longues années une vingtaine de membres du personnel ont répondus à une série de questions relatives à la relation qu’ils entretiennent avec ces lieux. J’adresse tous mes remerciements, pour s’être très généreusement livré à travers souvenirs et témoignages lors de ces entretiens, à l’équipe du Centre Hospitalier Saint-Marie de Privas et plus particulièrement à :

Mme. Sibille Bisson, M. Michel Boissonnat, M. Amar Bounachada, Mme Anne Boyer, Mme. Hélène Charre, Mme. Cecile Coste-Ramirez, M. Michelle Defudes, Mme. Dominique Drouard, Mme. Emeline Dumas, Mme. Martine Faure, M. Franck Giraud, Mme. Dominique Grangeon, Mme. Yvelyne Gresser, M. Michel Jean, Mme. Corinne Lagarde, M. Jean-Marie Mailhé, M. Pierre Montagne, Mme. Laurence Mouyon, Mme. Régine Moyon, Mme. Agnés Perriere, Mme. Christiane Porte, M. Fred Rampon, Mme. Marie-Laure Sonnier, M. Frédéric Viva, M. Nicolas Vivé.

Les photographies présentées ici reprennent une partie du diaporama sonore projeté dans l’exposition.
Diaporama, vidéo projection HD, 30 mn, en boucle.